À quelque chose malheur est bon
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"Coronavirus: quand la bêtise ne reste pas confinée" (La Provence)
"Les "covidiots", une triste épidémie de bêtise et de bassesses" (Ouest France)
"Coronavirus: la bêtise n'a pas de limite" (La Dépêche)
Et si on profitait au contraire de l'épidémie pour (re)devenir intelligents?
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L'association de graphopédagogues 5E a pour devise "L'écriture, au-delà du geste".
C'est qu'écrire est une activité intellectuelle complexe, qui met en jeu bien d'autres choses que des habiletés motrices. C'est pour cela qu'un enfant méticuleux champion de graphisme en maternelle pourra moins bien réussir son entrée dans l'écriture qu'un élève jusque là brouillon mais à qui le sens de cette activité aura été mieux transmis.
Fondamentalement, l'organe de l'écriture, ce n'est pas la main, c'est le cerveau. Nombreuses sont les personnes, handicapées de naissance ou au cours de leur vie, à écrire "manuscritement" de leur "mauvaise" main, voire du pied ou de la bouche! Et elles sont parfois plus efficaces que certains scripteurs classiques!
En rééducation de l'écriture, je travaille en général avec les élèves sur les points suivants:
-motricité et dissociation des doigts,
-tenue de crayon et posture générale,
-formation des lettres et fluidité du geste,
-stratégies de copie.
C'est ce dernier point qui m'intéresse aujourd'hui et c'est là que le masque peut être utile!
Pourquoi? Parce que ce qui empêche les élèves de copier efficacement et intelligemment, c'est souvent leur incapacité à utiliser leur "voix intérieure".
Dans chaque activité intellectuelle (lire, copier...), un adulte harmoniseusement construit ne parle pas forcément à voix haute, mais il se parle dans sa tête. C'est ce qu'on appelle la pensée langagière.
Élisabeth Nuyts montre bien que cette pensée langagière n'est pas spontanée mais construite. Cela s'apprend.
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Et pour ceux qui n'ont pas appris, toute activité scolaire, même simple, devient non seulement fastidieuse mais inefficace. L'élève "travaille" formellement, mais inutilement. À la fin, les yeux ont parcouru la page, le texte est recopié, mais, si cela a été fait "hors sens", rien ne s'est inscrit dans le cerveau de l'élève.
Élisabeth Nuyts insiste sur le fait que, pour développer cette voix intérieure, cette pensée langagière, il ne faut pas vouloir aller trop vite. Le jeune enfant doit passer par les étapes suivantes:
-1) travailler à voix haute (lire à voix haute, écrire en disant ce que l'on copie...)
-2) travailler en chuchotant
-3) travailler en subvocalisant (bouger les lèvres comme pour parler mais sans émettre de son)
-4) après seulement, en temps voulu, travailler dans un silence extérieur qui n'est plus un silence intérieur quand on sait parler en soi.
Quand ces étapes ont été sautées ou passées trop rapidement, c'est par là qu'il faudrait repasser. Combien d'élèves qui se plaignent de ne pas comprendre la consigne s'écrient "Ah, c'est ça!", quand on leur demande de la lire à voix haute! Leur voix leur a donné accès à ce à quoi leurs yeux seuls n'arrivaient pas à donner sens.
Malheureusement, beaucoup se refusent à refaire ce chemin, assimilant sans doute le fait de travailler à voix haute à un comportement de bébé. Et n'est-ce pas ce que nous leur avons parfois dit nous-mêmes, parents désireux d'avoir un peu de silence, enseignants craignant le bruit dans nos classes?
Image par Gerd Altmann de Pixabay |
Pourtant, ce cheminement est nécessaire à la construction de leur autonomie.
Peut-être vaut-il mieux leur apprendre lentement à travailler seuls que de devoir toute leur vie pratiquer pour eux l'"étayage", comme on dit, c'est-à-dire bien souvent faire pour eux le cheminement de pensée et les cantonner à des micro-tâches formelles. |
Pour ceux qui constatent l'efficacité de chuchoter en travaillant mais ont peur des remarques du professeur ou des moqueries des camarades, le masque est une chance!
Derrière son voile, que les lèvres n'hésitent pas à bouger, voire à chuchoter! Rien ne se voit, et rien ne s'entendra non plus, les sons étant atténués.
Et, d'ici à ce que nous les enlevions, la pensée langagière aura été construite et la quatrième étape atteinte!
♦Pour approndir le sujet, lisez aussi:♦
Copier intelligemment et efficacement
Au programme:
Pourquoi et comment faire écrire nos élèves? Qu'est-ce qu'une écriture efficace? À quoi sert l'écriture à l'école?
D'où viennent leurs difficultés? Pourquoi tant d'élèves sont-ils en difficulté, même lors d'activités scolaires simples (écouter, lire, copier)?
Comment copient-ils? Ce que j'ai constaté sur un échantillon de 47 élèves de 6e. Éclairant.
Comment les aider? Que pouvons-nous faire en tant que parents ou enseignants? Quelle est l'urgence?
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